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Orge et Yvette pour Ségolène
17 janvier 2007

Agriculture, environnement et santé : vers le tout bio ?

Une cinquantaine de Villebonnais et de gens des environs sont venus participer samedi 13 au goûter débat organisé par la section socialiste de Villebon sur le thème Agriculture, environnement et santé : vers le « tout bio » ? Deux heures d’un remue-méninges très riche, prolongé agréablement devant jus de fruits et gâteaux bio faits maison, dont nous tentons ici une brève synthèse. A vous de le prolonger en nous envoyant vos propres idées et commentaires !

Tordant le cou aux idées reçues sur des pratiques qui seraient placées sous le signe d’une nostalgie passéiste, Frank-Olivier Trombetta, agriculteur de Marcoussis, a insisté d’emblée sur la haute technicité et les exigences du cahier des charges de ce type de pratique agricole. Il faut savoir que le niveau d’éducation moyen d’un agriculteur français se situe à bac + 2 et qu’il est encore plus élevé dans la filière bio…

Exclure tout produit chimique de synthèse (y compris pour vacciner les animaux !), respecter les cycles naturels et la vie animale (à l’encontre de l’élevage en batterie…), garder le lien au sol : ces règles de base du « bio » relèvent d’une conception de la nature moins naïvement scientiste que celle de l’agriculture productiviste, pour laquelle le sol serait un simple support pour une production de masse à grands renforts d’engrais chimiques, de pesticides et de désherbants. Quitte à détruire les sols et à produire des aliments pas toujours très sains (comme on l’a vu avec la crise de la « vache folle »), et en tous cas moins « goûteux » !

Pour l’agriculteur biologique, au contraire, chaque parcelle de sol est un écosystème de millions d’êtres vivants et c’est par une meilleure connaissance, un meilleur respect, de cet écosystème que l’on parvient à produire mieux et plus durablement.

C’est évidemment moins facile, d’autant plus que les îlots de cultures bio peinent à se protéger de leur entourage non bio : la moindre contamination par un pesticide répandu par le voisin entraîne un déclassement de la récolte ! Il faut donc s’entourer tant bien que mal de zones faisant barrière aux agressions chimiques.

Chercheur à l’INRA, Jean-François Castell nuance ces propos en faisant d’abord remarquer que le but premier de l’agriculture est de nourrir les hommes, but qui est loin d’être atteint dans nombre de pays du sud. L’agriculture productiviste a eu tout de même le mérite de procurer une sécurité alimentaire aux nations développées. Mais cela s’est fait au prix d’une mise en danger des sols et des eaux et au prix d’excédents chroniques qui, exportés à bas coût, condamnent les paysans du sud à l’exil alors que, dans le même temps, l’Europe oppose des barrières aux produits agricoles de nombreux pays du sud !

Quant aux OGM, outre qu’ils soumettent les agriculteurs à une dépendance envers les semenciers, ils font évidemment courir le risque de se propager à d’autres espèces avec des conséquences imprévisibles. Le risque est plus ou moins grand selon les plantes cultivées, le maïs présentant les meilleures garanties de ce point de vue. Mais, même sans risque de propagation, les OGM apparaissent comme une fausse solution. En effet, la plupart des OGM employés en agriculture ont pour but d’immuniser les cultures contre un type de désherbant dont on inonde ensuite la récolte. Mais la sélection naturelle permet aux « mauvaises herbes » de trouver naturellement la parade et de rendre ces mêmes désherbants inopérants !

Face aux nouvelles exigences des consommateurs en termes de santé, de qualité des produits, mais aussi de respect de l’environnement et des animaux (voir le succès des œufs de poules élevées en plein air…), la recherche agronomique doit trouver le moyen d’accroître le rendement tout en diminuant les atteintes à la nature et la quantité de produits répandus dans la nature.

Les agriculteurs eux-mêmes ont bien compris qu’il était de leur intérêt de ne pas détruire leurs propres sols et de cultiver des produits sains. D’autant plus qu’ils sont les premières victimes de l’agrochimie : la maladie de Parkinson, par exemple, fait des ravages chez les agriculteurs adeptes des insecticides chimiques !

A défaut d’une agriculture labellisée bio, très exigeante et gourmande en temps de travail (mais aussi source potentielle d’emplois !), l’INRA essaie de promouvoir une agriculture « raisonnée », dont l’avènement lui semble inéluctable comme une étape de transition vers le bio. D’ailleurs, de plus en plus d’agriculteurs productivistes découvrent l’intérêt des méthodes douces en faisant appel à des « auxiliaires de culture » comme… les coccinelles.

Cette évolution devra être impulsée par une volonté politique. En effet, les aides à l’agriculture assurent 80% des revenus de nos paysans et c’est bien par une réorientation de ces aides que l’on peut faire bouger les choses ! La France a de gros progrès à faire puisque, à la différence d’autres pays européens, elle n’accorde aucune subvention particulière au bio.

Reste que, faute d’un marché suffisant, insuffisamment aidée et généralement cantonnée à de petites exploitations, l’agriculture bio reste de 20 à 40% moins productive à court terme que l’agriculture traditionnelle, selon les chiffres avancés par M. Trombetta, et compte non tenu du coût des dégâts à l’environnement. Et par conséquent, ses produits plus coûteux restent aujourd’hui réservés aux plus aisés.

Comment sortir de ce cercle vicieux ? Tandis que l’INRA mène ses recherches visant à concilier productivité et défense de l’environnement, des associations comme les Jardins de Ceres tablent sur l’agriculture de proximité pour faire baisser les prix en supprimant les intermédiaires tout en limitant le kilométrage effectué par les produits depuis le champ jusqu’à la table du consommateur. Achetée à l’avance sous forme de parts dans la récolte, la production bio atteint des prix compétitifs : une participante au débat déclare nourrir sa famille de cinq personnes en tout bio pour 15 € par jour grâce à l’AMAP du plateau de Saclay.

Diversifier la production en redécouvrant notamment des espèces anciennes et succulentes, adapter davantage sa consommation à la production locale, ce qui est aussi une façon d’opposer la diversité des terroirs au fast food globalisé, sont aussi des moyens de consommer plus « malin » et plus écologique.

Une autre approche intéressante est celle présentée par Olivier Thomas, maire de Marcoussis. Dans sa commune, un chantier d’insertion répondant au nom prometteur de « Jardins de cocagne » permet à des jeunes en difficulté de cultiver des produits maraîchers bio dont ils consomment une partie de la récolte, des paniers de leurs produits étant par ailleurs distribués jusqu’à Paris.

Plus généralement, se pose le problème de l’exode organisé du monde rural. En 1980, ils étaient encore 1,2 millions d’agriculteurs en Europe. Aujourd’hui (2006), il en reste 900 000. La commission de Bruxelles n’en voudrait plus que 600 000 à l’horizon 2010. Et ce n’est pas le coût du foncier rural qui incitera des jeunes à s’installer ! Les ZAP (zones agricoles prioritaires), comme celle du « triangle vert du Hurepoix », tentent de stopper la hausse du prix des terrains en gelant pour trente ans les permis de construire. Là encore, c’est une question de volonté politique, note Olivier Thomas.

Dans sa présentation des enjeux tels que les perçoit Ségolène Royal, Thomas Chaumeil fait d’abord la preuve que la candidate socialiste est bien en phase avec les avis et les interrogations de la salle !

Pour les participants, il est en effet essentiel de :

  • Produire localement.

  • Maintenir la diversité des variétés régionales.

  • Consacrer un budget pour l’information des citoyens et des scolaires sur cette thématique.

  • Valoriser les métiers.

  • Aider les jeunes à s’installer.

  • Combattre la hausse du foncier et, en région parisienne, freiner la disparition des terres arables.

  • Faire baisser le coût pour le consommateur.

Les avis sont en revanche très réservés sur les biocarburants, nouvelle panacée, qui en dépit de leur nom risquent fort d’être produits par des méthodes pas du tout bio !

Comment atteindre concrètement les objectifs retenus par la salle et par la candidate ? Ce pourrait être le thème d’un nouveau débat. Vos suggestions sur ce blog seront les bienvenues !

Lire aussi les impressions d'Olivier Thomas sur son blog.

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