In memoriam Georges Frêche
J'ai croisé il y a bien longtemps un certain Georges Frêche, excellent professeur d'histoire, fier de sa ville de Montpellier dont il se plaisait à rappeler qu'elle abrite la plus ancienne université de médecine de France.
Cette ville, il l'a fait entrer dans l'ère des nouvelles technologies. Il l'a rénovée de fond en comble, lui a donné un centre animé mariant avec bonheur l’élégante architecture 18ème de la place de la comédie avec le classicisme post-moderne de Bofill. Nouant des relations privilégiées avec sa grande sœur Barcelone, il a fait de sa petite capitale une sorte de phare de la régionalisation réussie. Les Parisiens en mal de soleil et de joie de vivre s’y sont précipités en rangs serrés.
Oh, certes, il a toujours eu sa "grande gueule", on est comme ça nous autres les gens du Midi, et ses concitoyens l'appréciaient aussi pour cela. Il menait certes de drôles de guerres picrocholines avec un certain Blanc, son ennemi juré, l’homme dont il dénonçait à l’époque les accointances douteuses avec le Front National et dont l’hôtel de région narguait sa mairie. Alors, (on ne parlait pas encore de réchauffement climatique), il laissait allumées les lumières de son dernier étage pour empêcher l’hôtel de région de se refléter dans le canal, alors que Blanc l'avait construit là justement à cause du reflet. La vie politique du sud connaît parfois ce genre de gamineries.
Si je parle de lui à l’imparfait, c’est parce que le Georges Frêche dont il est question ici est mort. Un « body snatcher » venu d’une autre planète s’est emparé de son cerveau et lui a fait tenir des propos que le Pen lui-même ne profèrerait pas sans rougir. Triste fin pour un grand édile qui fut socialiste et que notre parti ne saurait, sans se déshonorer, conserver plus longtemps dans ses rangs.
Voici, sur un ton plus pondéré, ce qu’a déclaré Ségolène dès qu’elle a eu connaissance des propos en question :
"Il faut redire ici toute la fierté que nous avons pour l'équipe de France. Ces footballeurs nous font honneur, font honneur à la France : ça mérite d'être redit aujourd'hui. Si ces propos ont été effectivement tenus, ils sont insupportables. Ce sera au PS de prendre une décision, conformément à ses statuts. Il faut que Georges Frêche s'explique".
Cette relative modération s'explique facilement quand on pense à la façon dont les propos de Ségolène ont été déformés pendant cette précampagne. Georges Frêche serait-il victime des mêmes déformations "bien intentionnées" ? Connaissant un peu le bonhomme, j'en doute. Le politiquement incorrect, il le savoure comme une petite anisette. Mais son politiquement incorrect à lui sent diablement mauvais.
Plus « royaliste » pour une fois que Ségolène, j’ose écrire ici qu’il faut que Georges Frêche, ce Georges Frêche que j’ai admiré, se taise enfin et s'en aille.